22 juin 2009

La licence globale pour la musique, c'est moins d'un euro et demi par mois et par abonnement, en comptant large

Le calcul est simple : prenons le chiffre d'affaire de l'industrie musicale. Prenons-le, pour éviter la polémique, à son apogée : il y a quelques années, à son plus haut, l'industrie musicale pesait ainsi 1,5 milliards d'euros. (Depuis, si le chiffre d'affaire a effectivement baissé, les bénéfices ont augmenté : c'est la magie de la disparition des supports physiques… mais ne chipotons pas et prenons donc le chiffre maximum.)

Sur ces 1,5 milliards, les artistes n'en touchent généralement même pas un dixième. En effet, sur les morceaux vendus en ligne, on parle de 3% en moyenne, 6% après redistribution de la SACEM. Mettons donc 10%. Sur les CDs, même si plus personne n'en achète, les artistes chanceux touchent environ 20%. Soyons fous, supposons que les artistes pèsent 20% d'un milliard et demi d'euros par an. (En pratique, les majors possèdent beaucoup de droits sur les morceaux, donc grignotent une part importante de cette part, mais passons.) Le reste des 80% revient à la TVA, aux distributeurs (magasins physiques ou maintenant en ligne), et aux maisons de disques pour éditer et transporter les supports physiques (les CDs) et d'autres tâches comme faire de la publicité aux artistes (même si de plus en plus elles se contentent de signer pour un artiste qui fait le buzz sur le net). Des rôles qui dans le cadre d'une licence globale deviennent inutiles et n'ont donc pas à être compensés.

Pour payer nos artistes, on doit donc générer avec notre licence globale, dans les prévisions les plus larges, 300 millions d'euros par an (20% d'un milliard et demi). Soit 25 millions d'euros par mois. Enorme ? Et si je vous rappelle qu'il y a de l'ordre de vingt millions d'abonnements à Internet en France (environ 17 si je ne me trompe pas) ? En réalité, une taxe d'un euro et demi par mois et par abonnement paierait donc nos artistes du monde de la musique. En comptant, à chaque fois, le plus large possible (on doit plutôt être de l'ordre d'un euro par mois).

CQFD.

20 juin 2009

Le faux parti pirate français

Il y a quelques années s'est créé en Suède le Parti Pirate, qui avait pour buts de protéger les libertés individuelles, de réformer le droit d'auteur pour permettre notamment le libre échange d'œuvres à but non commercial, ou encore de réformer en profondeur le système des brevets, notamment en interdisant les brevets sur le vivant ou les logiciels.

Aujourd'hui, comme vous le savez peut-être, ce parti est le troisième plus important du pays, le premier chez les moins de 35 ans. Aux élections européennes, il a remporté un siège, et devrait en obtenir un second si le traité de Lisbonne entre en application et que le nombre de députés suédois passe à vingt. C'est une réussite extraordinaire pour un parti qui a à peine trois ans et dont personne ne parlait à la télé avant ce résultat extraordinaire. Mme Michu a été toute étonnée de découvrir que ce parti de pirates ridicule avait trouvé des voix, mais les internautes savent pourquoi ils ont voté "pirate". Parce que leur gouvernement écoute trop les lobbys.

Ce succès a déclenché une certaine fébrilité chez beaucoup d'internautes français. Avec les lois catastrophiques pour les libertés fondamentales ou les droits des citoyens que le gouvernement mené par Sarkozy essaie de nous imposer, ça marcherait probablement pas mal chez nous aussi…

De plus en plus de monde s'intéresse donc à une association fondée il y a quelques temps, le Parti Pirate, qui est en train de se lancer (en fait divisé en deux structures, la seconde étant le Parti Pirate canal historique). Apparemment les auteurs sont entrés en contact avec les autres structures européennes et ont prévu d'envoyer par exemple des représentants en Allemagne. Ils rédigent en ce moment un manifeste et sont en train de définir tous les détails pour un vrai lancement et ouvrir des inscriptions dans les règles.

Seulement voilà, il y a un type très égocentrique qui s'est dit qu'il allait lancer son propre parti pirate. Il l'a appelé le Parti Pirate Français, a créé une association (c'est pas très difficile) et a créé un groupe Facebook et un blog sur… unblog.fr justement. (Je refuse de mettre un lien vers cette chose, ça risquerait de le faire monter dans les résultats des recherches sur les moteurs de recherche…) Il a ensuite contacté toute la blogosphère en prétendant vouloir réunir les différentes initiatives

Dit comme ça, pourquoi pas… Sauf qu'il n'a pas pris la peine de contacter le groupe qui existait déjà. Ni même pris la peine de réagir à leurs tentatives à eux de prendre contact avec lui. Plusieurs se sont fait avoir et ont accepté un entretien avec lui en croyant à ce qu'il racontait, comme la Quadrature du Net, Le Post qui a carrément fait un article sur lui, ou encore Tristan Nitot (de Mozilla) qui l'a aussi mis en lien sur son blog…

Mais rapidement tout le monde va se rendre compte que ces beaux discours au pluriel et ces "nous" partout cachent un individu arriviste à l'égo sur-dimensionné, qui passe son temps à prétendre vouloir fédérer tout le monde et ne pas vouloir prendre la direction du mouvement, alors que c'est tout l'inverse. (De toute façon ça parait tout de suite étrange qu'il passe son temps à répéter cela…)

Ce type que j'ai vraiment envie d'insulter s'appelle Rémy Cérésiani, et il n'en est pas à son premier coup du genre. En fouinant un peu autour de soi on découvre que ce jeune étudiant de Sciences Po (20 ans) s'est depuis longtemps illustré par son égo démesuré et sa volonté de s'imposer comme le seul à vouloir fédérer un mouvement : à l'époque, c'était le socialisme à Sciences Po… C'est par exemple dans un journal de gauche (qui ne partage pas vraiment sa vision égocentrique) que vous pouvez lire un passage très savoureux (très exactement le numéro 11 d'InVodkaVeritas, page 14 à 15, rubrique "Chronique de l'ambition ordinaire") qui vous apprend qu'il avait déjà à l'époque la même manière de procéder…

Bref, Rémy Cérésiani a flairé le filon. Alors il a sauté dessus, au mépris de tout ce que ça pourrait coûter au véritable Parti Pirate et aux citoyens français désireux de voir émerger un vrai parti, et pas le jouet d'un guignol assoiffé de pouvoir.

10 juin 2009

HADOPI censurée par le Conseil Constitutionnel

\o/

Bon, il reste pas mal de déchets dans la loi qui sont passés, notamment le spyware labellisé par le gouvernement, mais c'est quand même un sérieux coup dans l'aile pour cette loi stupide et inutile…

26 avril 2009

HADOPI n'a pas été rejetée par les socialistes

Juste un coup de gueule rapide contre les médias et tous les imbéciles qui répètent la propagande de l'UMP.

Lors du rejet de la loi HADOPI les socialistes n'étaient pas en majorité dans l'hémicycle. La Majorité Présidentielle avait la moitié des députés (18 en comptant le Nouveau Centre sur 36 députés) et en comptant d'autres députés non inscrits, comme Nicolas Dupont-Aignan, la droite était majoritaire.

Le texte a été rejeté par ce dernier et deux députés UMP, opposés à HADOPI depuis le début, ainsi que Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre) qui a craqué à la fin et voté contre à cause du retour de la double peine (coupure de l'accès interent mais amende indirecte en continuant à payer l'abonnement). Du côté de l'opposition, notons la présence de plusieurs partis différents, incluant des Verts (Martine Billard je t'aime !) et probablement des Communistes, il n'y avait donc pas tant de socialistes que ça…

Au final malgré une domination de la droite (19 voix sur 36) le texte sera rejeté par 4 de ces députés dont 2 UMP, permettant la manœuvre de quelques députés de l'opposition (pas seuleument socialistes, rappelons-le) de faire changer la donne en sortant de derrière leur rideau, et un rejet à 21 voix contre 15.

Ce qu'il faut en retenir surtout, c'est que les députés UMP ne sont pas du tout emballés par ce texte. Personne dans l'hémicyle ne s'y connait vraiment d'un point de vue technique, mais tous les députés sont assaillis de mails de leurs électeurs les prévenants des grosses failles dans la loi. Et la façon dont Christine Albanel a répondu à leurs questions ou à celle de leurs collègues de l'opposition, en esquivant le sujet ou en se retranchant derrière ses pétitions d'artistes (complètement bidonnées d'ailleurs), ne les a pas franchement rassurés.

Un groupe de députés UMP est même sorti de la salle quelques minutes avant le vote, protestant pas trop ouvertement contre la loi. Ce sont eux qui auront finalement fait pencher la balance, et pas la demi-douzaine d'élus de gauche appelés au dernier moment, lorsqu'on a réalisé qu'une manœuvre était possible.

Ce sont ces députés UMP qui en exprimant leur scepticisme ont permis le rejet d'HADOPI. Ils méritent presque autant de remerciements que les députés qui ont voté contre quelques instants plus tard.

25 mars 2009

Peer-to-peer : qu'en pensent vraiment les artistes ?

Lors des débats sur la loi dite "HADOPI" par exemple, notre Ministre de la Culture Christine Albanel a de nombreuses fois prétendu être du côté des artistes, et s'en est servi pour accuser le camp adverse. Un site de propagande à l'adresse jaimelesartistes.fr a même vu le jour, proposant de nombreux discours d'artistes soutenant la loi Création et Internet. Tout le monde pense donc que les artistes soutiennent unanimement cette loi et les démarches du même genre. Mais la réalité est toute autre.


1) Le site jaimelesartistes.fr a été manipulé
En effet, si les artistes ont été conviés pour parler d'Internet en général, il semble qu'ils n'ont pas été prévenus qu'ils s'exprimaient en soutien de la loi HADOPI… Ils ont simplement demandé aux artistes comment eux feraient, puis fait un montage qui donne l'impression que chaque artiste soutien des aspects de la loi HADOPI.


2) La plupart des artistes ne réalisent pas les enjeux de cette loi
Un chanteur n'est pas plus intelligent qu'un autre, et à part les internautes peu de gens réalisent que la loi Création et Internet se basera sur un élément de preuve insuffisant pour sanctionner des soi-disant pirates, qui se verront refuser des droits fondamentaux comme la présomption d'innocence, ou encore le droit à la défense. Ah excusez-moi, ils auront le droit de contester une fois la coupure de leur ligne Internet effectuée, mais cette contestation n'annulant pas ladite coupure le temps qu'une enquête juridique soit menée, le résultat sera le même…
Donc beaucoup de soutiens à la loi HADOPI sont simplement des artistes à qui Mme Albanel a sorti sa propagande sur sa loi soi-disant éducative, et qui y ont cru.


3) Beaucoup d'artistes ont compris et défendent le "piratage"
C'est le cas par exemple de 700 artistes anglais qui se sont récemment exprimés contre la criminalisation de leurs fans, parmi lesquels Robbie Williams, Annie Lennox, Billy Bragg, David Rowntree de Blur, Ed O’Brian de Radiohead, Peter Gabriel, David Gray, Fran Healy de Travis, Nick Mason de Pink Floyd, Mick Jones des Clash, Craig David, Iron Maiden, Soul II Soul, Wet Wet Wet, David Gilmour…
En France, le seul pays au monde où le gouvernement n'a pas abandonné l'idée de la riposte graduée en continuant à essayer de faire passer sa loi HADOPI, les artistes sont loin d'être aussi unanimes qu'annoncés par la propagande du Ministère de la Culture. Outre les manipulations dénoncées plus haut, certains se positionnent ouvertement contre la loi HADOPI, comme Cerrone, lui aussi utilisé par le Ministère de la Culture, qui a déclaré entre autres :
"Je n'ai jamais autant gagné ma vie qu'aujourd'hui grâce aux droits dérivés alors que mes musiques sont pillées par les DJ pour des samples et que mes albums sont piratables"
"Une fois que la loi sera passée, on n'arrivera pas à l'appliquer"
"La musique est condamnée à être gratuite et il faut trouver des solutions pour créer des revenus autrement"


Il est donc très exagéré de dire que tous les artistes soutiennent la loi Création et Internet. Ce qui est sûr, c'est qu'il y en a qui s'y opposent et/ou pensent qu'elle ne servira à rien, et que le Ministère de la Culture a recours à la manipulation pour faire croire que d'autres la soutiennent. Etrange pour une loi qui est sensée les protéger…

24 mars 2009

Le piratage ne tue pas la musique, ce sont les majors

1) Le piratage ne tue pas la musique
Les industries musicales ne cessent de répéter que le piratage entraine une baisse des ventes, et de citer des études qu'elles ont faites elles-même pour le prouver. Sauf que quand on consulte des études menées de façon indépendante on constate que ce n'est pas du tout exact. Si vous voulez, quelques gus en ont recensé tout un tas.


2) Les maisons de disque se portent très bien
Allez direct un bon exemple : Universal Music augmente ses bénéfices. En double période de crise (crise du disque et crise économique) c'est quand même bien joué. Pourquoi alors répètetent-ils tous qu'ils gagnent moins d'argent ? Parce que c'est vrai, d'année en année leur chiffre d'affaire diminue. Mais pour une simple raison : on vent moins de CDs, or tous ces CDs il faut les éditer (imprimer des milliers de copies) et les distribuer (transports, supermarchés, autant d'intermédiaires qu'il faut bien payer). Or maintenant qu'on vend moins de CDs (oui oui c'est la crise du CD) on vend beaucoup plus de musique en ligne et d'autres recettes s'ajoutent (comme les radios en ligne, etc…) qui elles ne coûtent rien en frais d'édition ou de transport (la magie d'internet et du numérique) et peu en distribution (juste la plate-forme de téléchargement ou de radio). Conséquence ils se font peut-être deux fois moins d'argent qu'avant mais en avancent quatre fois moins de l'autre côté, ça fait un bénéfice au final même si le chiffre d'affaire baisse. Donc les maisons de disque ont un chiffre d'affaire en baisse, c'est vrai, mais ça ne veut pas dire qu'elles sont en difficulté.


3) Les artistes se font enc*ler par les maisons de disque
Allez un petit exemple : tu fais deux albums avec EMI, vendus à 2 millions d'exemplaires. Eh ben tu touches rien, t'as 1,5 millions de dettes, et si tu protestes EMI te poursuit en justice et te réclame 30 millions de dollars. Ca pique un peu, non ?

Allez autre constat amusant, plus général celui-la. Combien gagnaient en moyenne un artiste et sa maison de disque pour un album (sur un CD vendu 20€ dans cet exemple) ?
8,69€ à la maison de disque,
3,68€ au magasin et aux grossistes,
3,18€ aux artistes interprètes,
1,17€ aux paroliers et compositeurs
et enfin, 3,28€ pour la TVA de 19,6%.
On ne peut pas dire que les artistes avaient beaucoup de revenus à l'époque du CD qui maintenant disparait… Mais heureusement, avec le développement d'Internet, les maisons de disque ont beaucoup moins de frais pour éditer et distribuer les musiques lorsqu'ils les mettent simplement sur des plate-formes, donc les artistes devraient en bénéficier et voir leur part augmenter ! Eh bien non. Les maisons de disque empochent plus des deux tiers du prix de vente TTC, et les artistes (auteurs, compositeurs et interprètes) se partagent 3 centimes (plus 2,76 centimes de la part de la SACEM qui seront redistribués à des auteurs et compositeurs, j'ai pas encore compris pourquoi la SACEM prélevait de l'argent là pour le redistribuer derrière en en dépensant une partie au milieu mais je ne vais pas spéculer sur toutes les magouilles qui doivent avoir lieu…)
Ceci bien sûr quand elle n'obtient pas tout simplement des artistes qu'ils renoncent tout simpleemnt aux revenus des ventes en lignes.
Donc en clair au lieu d'augmenter logiquement la part des artistes, les maisons de disque ont augmenté leurs bénéfices en les en*ulant complètement. La conclusion de ce dernier article est de plus très bien réalisée, je vous encourage vivement à le lire en entier, il n'est pas très long et il met bien les points sur les i…


Donc merci de ne pas répéter bêtement ce qui vous semble évident ou ce que répètent les lobbys, et de vous interroger maintenant : à votre avis, qui est responsable de la situation catastrophique des artistes…?

20 mars 2009

Comment HADOPI va peut-être multiplier votre ping par 8

Vous avez une entreprise qui a besoin qu'on puisse accéder rapidement à ses serveurs ? Vous êtes un gamer qui est heureux de gagner 10ms de ping ?

Alors sachez qu'en Irlance, depuis qu'un FAI a activé le filtrage comme ce sera peut-être le cas demain en France si on laisse passer la loi HADOPI, le temps d'accès des serveurs d'une entreprise a été multiplié par 8

Comment la loi Création et Internet va faciliter la condamnation à 300'000€ d'amende et 3 ans de prison

Dans mon précédent billet j'ai montré que malgré les affirmations de Mme la Ministre de la Culture, elle n'était pas capable de démontrer que l'adresse IP était une preuve suffisante pour condamner un abonné à Internet. Et pour cause, devant un tribunal, cela ne suffit pas.

La précédente loi pénalisant le téléchargement illégal, dite DADVSI, permettait de poursuivre en justice un pirate pour une peine allant jusqu'à 300'000€ d'amende et 3 ans de prison. En pratique, très peu de poursuites ont été effectuées (et les condamnations ont heureusement été beaucoup moins lourdes) pour la bonne et simple raison qu'il fallait une démarche très lourde une fois l'adresse IP relevée pour prouver la culpabilité. Dans l'exemple du billet précédent, il avait fallu que les gendarmes saisissent l'ordinateur de l'accusé et constatent la présence d'œuvres "piratées", et ils avaient également obtenu des aveux. C'est cette procédure très lourde pour finalement pas grand chose qui a rendu la loi DADVSI inefficace, les juges refusant de faire "un exemple" en condamnant sévèrement à 3 ans de prison les malchanceux sur qui était tombé le sort, ce qui aurait peut-être eu plus de retentissement et aurait probablement dissuadé beaucoup de petits "pirates".

La loi actuellement débattue, loi "Création et Internet" ou encore HADOPI, est annoncée comme prenant une autre approche, la "riposte graduée" qui consiste à envoyer plusieurs avertissement aux "pirates" avant de les sanctionner en leur coupant leur accès à Internet pour quelques mois, ce qui semble certes moins démesuré qu'une peine de prison et des milliers d'euros d'amende pour quelques mp3…

Je ne reviendrai pas ici sur tous les problèmes que pose cette nouvelle loi, j'aimerais avant tout signaler un fait bien simple : si cette loi HADOPI passe, il n'y aura plus besoin de persquisition des gendarmes ou d'aveux pour vous considérer coupable, seule la détection d'adresse IP suffira et vous recevrez donc un avertissement au premier téléchargement illégal, qu'il soit de vous ou d'un autre utilisateur de votre ligne (enfant à la maison, employé dans votre PME, ou encore un "pirate" qui a contourné le chiffrage de votre accès WIFI et se sert sur le net en vous faisant porter le chapeau…)

Or, maintenant que les amendements empêchant de cumuler DADVSI et HADOPI ou abrogeant l'inutile DADVSI ont tous été refusés sur la consigne du rapporteur et de Mme la Ministre de la Culture, rien n'empêchera de vous poursuivre quand même en justice sur la seule fois maintenant du relevé de votre adresse IP, et de brandir le fait que la HADOPI vous aura envoyé un mail d'avertissement pour réclamer les 3 ans de prison et les 300'000 euros d'amende de la DADVSI sans faire constater le délit par une perquisition ou obtenir des aveux. Comme la loi HADOPI aura été adoptée, l'accusation lors de ce procès pourra invoquer le fait que le relevé de l'adresse IP y est considéré comme une preuve suffisante de votre culpabilité, et vous avez intérêt à trouver un bon avocat pour expliquer au juge qu'une loi adoptée par le Parlement est entièrement basée sur du vent

Que Mme la Ministre et les autres défenseurs de cette loi cessent donc de répéter qu'elle veut remplacer la précédente et prendre une tournure plus éducative que répressive. La loi HADOPI, telle qu'elle est faite maintenant, va au contraire grandement faciliter la répression si elle est adoptée.

19 mars 2009

Justification bancale d'Albanel sur la suffisance de l'adresse IP comme preuve pour sanctionner

J'ai assisté aux débats de la loi Création et Internet, et au milieu de tous les problèmes posés par cette loi l'un des principaux me semble être le caractère de preuve irréfutable de l'adresse IP brandie par Mme la Ministre de la Culture.

Je rappelle que l'ensemble du système de la riposte graduée est basé sur un relevé des adresses IP qui téléchargent illégalement des œuvres protégées sur internet, et la sanction sans passer par un tribunal de l'abonné titulaire de la ligne correspondante (avertissements puis coupure de l'accès à Internet). Il est donc grave de mettre en place un tel système sans justifier de l'infaillibilité du relevé de l'adresse IP. 

Jeudi dernier, M. Tardy, le seul député UMP présent et ouvertement opposé à beaucoup de points de cette loi, a de nombreuses fois demandé à la Ministre de démontrer le caractère de preuve de l'adresse IP, en ne manquant pas de citer une affaire juridique dans laquelle l'adresse IP n'avait pas été reconnue comme suffisante pour prouver la culpabilité.

Mme Albanel, après avoir ignoré de nombreuses fois cette question, a finalement cité une affaire portée devant la Cour de Cassation pour en justifier :

"J’apporterai toutefois une précision à l’intention de M. Tardy, qui a évoqué un jugement de Guingamp sur l’adresse IP. L’adresse IP est considérée comme un élément de preuve par la Cour de cassation, et ce de façon constante. Elle valide les procédures judiciaires conduites sur cette base, comme le montre le dernier arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 13 janvier 2009. Il s’agit d’un élément fort, même si le tribunal de Guingamp, à un moment, a pris une autre position, jugement qui, d’ailleurs, n’est pas définitif."
http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090193.asp#P374_57141

Argument qui a évidemment laissé M. Tardy sans réponse. Néanmoins je m'étonne que personne n'ait parlé de ce jugement par la suite, car les termes de Mme la Ministre me semblent un peu hâtifs, en effet :

1) Un "élément de preuve" ne constitue pas forcément une preuve. Dire que l'adresse IP est considérée ainsi "de façon constante" ne signifie donc pas que c'est toujours une preuve valide, mais simplement un élément qu'on prend en compte. Ce qui fait une grosse différence : ça ne prouve donc rien tout seul.
=> Il ne me semble donc pas suffisant de se baser un relevé d'adresse IP pour sanctionner quelqu'un.
http://www.servicecanada.gc.ca/fra/ae/guide/21_1_0.shtml#a21_1_1 pour des définitions

2) Le dernier arrêt de la Cour de Cassation, cité par Mme la Ministre comme exemple de validation d'une procédure basée uniquement sur l'adresse IP, n'est évidemment pas basé uniquement sur cette adresse IP. En effet, l'adresse IP a été relevée par un agent de la SACEM, qui a ensuite porté plainte auprès de la gendarmerie, qui a après autorisation du parquet adressé une réquisition au FAI pour obtenir l'identité de l'abonné utilisant l'adresse IP relevée, et surtout :
"les vérifications effectuées ont révélé que l’ordinateur portable de cet abonné était utilisé par C. S. qui a reconnu qu’il avait procédé au téléchargement de nombreuses oeuvres musicales avant de les mettre à disposition d’autres internautes"

On notera bien que le jugement ne s'est pas limité au relevé de l'adresse IP mais qu'il est clairement mentionné comme autres éléments de preuve d'une part une vérification de l'ordinateur et d'autre part les aveux de l'accusé. Je ne vois donc pas en quoi cet exemple prouve que l'adresse IP est un élément suffisant à prouver la culpabilité d'un accusé…
=> Toujours pas de justification pour considérer l'adresse IP comme une preuve irréfutable.
http://www.foruminternet.org/specialistes/veille-juridique/jurisprudence/cour-de-cassation-chambre-criminelle-13-janvier-2009-2837.html

3) Mme Albanel avoue elle-même que l'adresse IP n'est pas suffisante en parlant d'un "élément fort" : certes, il est fort possible que le possesseur de la ligne d'une adresse IP relevée soit coupable ou complice. Mais ce n'est pas une preuve suffisante.

En conclusion, Mme la Ministre n'a toujours en rien prouvé que le système de la loi HADOPI, basé sur la validité de l'adresse IP et sans autres éléments de preuves, est un système légitime.

C'est tout de même gênant quand on sait qu'une fois la loi passée la HADOPI enverra donc des milliers d'avertissements et de coupures d'accès en se basant sur un élément de preuve qui n'est pas reconnu comme une suffisant au tribunal…

Ne vous étonnez pas si au lendemain de cette loi vous recevez des avertissements puis vous vous faites couper votre accès à Internet alors que vous n'avez rien fait

25 novembre 2007

Le rapport Olivennes pour soi-disant protéger la Culture

Il y a quelques jours le PDG de la FNAC a remis a Nicolas Sarkozy un rapport proposant une liste de mesures à prendre pour soi-disant protéger les oeuvres culturelles (films, morceaux de musique...) du piratage informatique, qui serait responsable de leur déclin.

Vous pouvez consulter le lien suivant si vous n'avez jamais entendu parler du rapport Olivennes: PCInpact

Je voudrais ici vous exprimer pourquoi ce rapport est absurde ou encore pourquoi il porte gravement atteinte à la démocratie.


1) Les Droits d'Auteur peuvent etre facilement payés meme pour du gratuit.

Des dispositifs d'écoute de musique illimités et gratuits existent et rémunèrent les droits d'auteur. Un exemple? D'abord n'importe quelle radio, qui doit passer un accord avec la SACEM et se sert des revenus de la publicité pour financer les auteurs au pro-rata. Le site deezer.com a passé un accord similaire avec la SACEM et vous pouvez y écouter de manière illimitée n'importe quel morceau.

On pourrait imaginer facilement un dispositif similaire pour les contenus vidéo (films, séries, etc...), la télévision fonctionne ainsi, et le meme principe de financement en échange de publicité individuel pourrait etre appliqué. Si de telles alternatives existent, et si on incitait les gens à les utiliser plutot que de passer par du piratage, les auteurs seraient payés et cela sans rien couter aux usagers.


2) Nous payons déjà des amendes meme si nous ne piratons pas.

Cela en achetant un CD, un DVD, un Disque Dur, une clé-usb, et bientot tout ce qui permet de stocker des données numériques (carte mémoire, téléphone portable, console de jeu...) qui pourraient etre d'origine pirate. En effet, des taxes sont appliquées sur tous ces supports, en fonction de leur taille. Beaucoup de "pirates" vous diront qu'après avoir déjà payé l'amende, pourquoi se priveraient-ils de commettre l'infraction?

Ce système est insensé, mais tout le monde s'en moque. Ou plutot il y a tellement peu de gens qui s'en soucient qu'on a l'impression que tout le monde s'en moque, mais honnetement, vous trouvez ça normal?


3) Le "piratage" a aussi des effets bénéfiques...

... qui sont les memes pour des plates-formes de téléchargement gratuites: se faire connaitre par exemple. Je ne vais jamais acheter spontannément un album de quelqu'un que je ne connais pas. Mais si un ami me le fait écouter en m'envoyant le fichier mp3, je vais peut-etre apprécier le groupe et me mettre à suivre les concerts ou à acheter les albums ou les morceaux sur internet? Sinon, de toute manière, je n'aurais jamais rien payé, donc au final, meme si l'acte de piratage est mauvais dans le fond, en pratique il n'est pas strictement négatif pour les auteurs. Il est meme très positif pour les petits auteurs!

Bien sur il y a des auteurs qui protestent contre le téléchargement illégal. Mais ceux-là sont tous de gros vendeurs de musiques ou des vedettes de cinéma qui font plus que bien gagner leur vie (et sont pratiquement tous fiscalement expatriés par exemple...) Cela ne veut pas dire qu'ils ont tors, mais simplement qu'ils ne sont pas plus impartiaux dans l'histoire que M. Olivennes dans l'écriture de ce rapport...


4) Les mesures proposées sont purement et simplement anti-démocratiques

En effet, le Gouvernement propose purement et simplement de filtrer vos téléchargements. De manière systématique, meme si vous n'avez jamais été reconnu coupable, qui que vous soyez, on pourra lire tous vos faits et gestes sur le Net pour trouver du téléchargement illégal. Serait-il normal qu'on puisse lire votre courrier ou mettre votre téléphone sur écoute sans préavis ni raison valable? Et ceci meme pas pour trouver de dangeureux terroristes ou des réseaux de pédophilie, non, cela pour choper le salopard qui télécharge du Britney Spears...

C'est une mesure dictatoriale, mais comme monsieur-tout-le-monde n'utilise que très peu le net il ne s'en rend pas compte. Pour lui le net c'est un repaire de dangeureux délinquants, une source inépuisable de pornographie, et il envoie un mail tous les 15 jours. Mais comment réagirait-il si on lui annonçait qu'à partir de maintenant il ne pouvait plus rien ramener chez lui sans que ça soit analysé au préalable et approuvé par l'autorité de surveillance en place?

Vous pensez peut-etre que j'exagère et que notre président n'est pas un dictateur en puissance, en tout cas pas à ce point-là. Personnellement, je doute que le Gouvernement soit plus intelligent que monsieur-tout-le-monde, ou bien je pense qu'il fait exprès de ne pas comprendre la portée de cette loi. Nicolas Sarkozy a dit par exemple en 2006 qu'"avec Internet on peut faire n'importe quoi. On peut empêcher ces sites d'être utilisables en France. Ils le font bien en Chine." Il ne voulait peut-etre pas comparer ses mesures avec celles de ce régime complètement anti-démocratique, mais le fait est que c'est ce qu'il s'apprete à faire.


5) On peut se faire interdire d'accès à Internet sans rien faire d'illégal

Ceci simplement en ayant par exemple un réseau wi-fi. En effet, il est assez simple d'obtenir le mot de passe du réseau wi-fi de son voisin, si l'on récupère un programme sur le Net. Pas besoin pour cela d'etre un crack en informatique, puisque plusieurs programmes existent tout faits sur le net, qui arrivent pour certains à obtenir n'importe quel mot de passe en 10 minutes. Donc mon voisin peut télécharger sur mon réseau tout son saoul, au final c'est MA connexion qui sera coupée, MON nom qui sera banni auprès des FAI (Fournisseurs d'Accès Internet), et lui n'aura rien.

Vous pensez que c'est de la fiction? Non, il est précisé que chacun est responsable de la sécurité de son propre réseau, qu'on n'a qu'à mettre en oeuvre les sécurités proposées par notre FAI. Sécurités qu'on peut contourner assez facilement pour que plusieurs Ministères refusent d'installer un réseau wi-fi... Pardoxal, non, qu'un simple usager doivent miser sur des protections que le Gouvernement lui-meme ne reconnait pas comme fiables...


6) Le déclin du Disque n'entrainera pas la mort des artistes

Vous pensez peut-etre que les groupes vont disparaitre avec les disques si on ne fait rien. Mais n'oubliez pas que pendant des centaines d'années de nombreux artistes vivaient de leur Art sans CD ou DVD pour enregistrer. En ce qui concerne la musique en tout cas, la première source de revenu pour les artistes a toujours été les concerts. Et quand on voit l'engouement soulevé aujourd'hui par les concerts, et surtout le prix des places, je ne me fais pas de souci pour les artistes! Avec l'élévation du niveau de vie, les gens qui peuvent se payer un concert sont beaucoup plus nombreux, et le prix qu'il faut payer pour voir un grand artiste en vrai ne fait qu'augmenter en proportion. Les artistes plus modestes bénéficient indirectement de cette hausse.

Les artistes peuvent de toute manière s'en tirer avec des représentations, qui paient aussi leurs musiciens, danseurs et autres compagnons de scène... Meme s'ils perdaient leurs ventes de disques, ils n'en mourraient pas pour autant.


7) A qui profite cette loi anti-démocratique?

C'est bien simple: on nous dit que cette loi est destinée à protéger les Droits d'Auteur, la Culture, de bien grands mots qui n'expliquent en rien pourquoi on s'efforce de refuser des alternatives qui s'imposent de plus en plus. Les artistes pourraient s'y retrouver avec des sites d'écoute et de visionnage à la demande gratuits et illimités avec la pub. Les usagers feraient plus que s'y retrouver!

Mais pas l'industrie du disque. Pas Universal, EMI et les autres qui licensient à tour de bras depuis des années mais refusent d'accepter l'évolution de la Société amenée par Internet.

Et pas la FNAC, qui elle a encore moins de chances de pouvoir se reconvertir. Hasard ou pas que ça soit son PDG qui préside cette mission?


La situation est alarmante. Le Gouvernement traite ce qui tourne autour d'Internet de manière stupide, et cela ne date pas d'hier. Et toujours à l'avantage des grands groupes industriels... Soit le Gouvernement est un tas d'ignares, soit ils sont vendus à la cause de grands groupes industriels. Difficile de savoir ce qui est le pire des deux...